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JORGE SAMPAIO Address to the Parliamentary Assembly of the Council of Europe // Discours devant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

September 29, 2008

JORGE SAMPAIO
UN HIGH REPRESENTATIVE FOR THE ALLIANCE OF CIVILIZATIONS
HAUT REPRÉSENTANT DES NATIONS UNIES POUR L’ALLIANCE DES CIVILISATIONS

Address to the Parliamentary Assembly of the Council of Europe
Discours devant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

Fourth part of the 2008 Ordinary Session
Quatrième partie de la session ordinaire de 2008
Autumn Session /Session d’automne

Strasbourg,
29 -09- 2008

Monsieur le président
Monsieur le secrétaire général
Mesdames et Messieurs les parlementaires
Excellences
Mesdames et Messieurs

Monsieur le Président, tout d’abord, acceptez mes remerciements pour les aimables paroles avec lesquelles vous avez bien voulu m’accueillir.
C’est un grand honneur et un vrai plaisir que de m’adresser à cette assemblée d’élus, réunis ici sous l’égide de l’aînée des institutions européennes.
Permettez-moi de saisir cette occasion pour rendre hommage aux hommes et aux femmes qui depuis plus d’un demi-siècle œuvrent sans relâche à l’édification de la «Maison commune européenne», pierre après pierre, sur le socle des textes fondateurs du Conseil de l’Europe et de son large dispositif conventionnel.
En tant qu’européen convaincu, je tiens aux normes et aux valeurs portées, défendues et patiemment mises en œuvre par le Conseil de l’Europe, à travers les activités multiples et complémentaires de ses organes constituants. Je crois dur comme fer aux principes de la paix, de la justice et aux droits de l’homme qui, tous, sous-tendent le projet européen.

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs

Je suis heureux de pouvoir m’adresser à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe au nom des Nations unies.
Le sujet qui nous réunit aujourd’hui me tient à cœur – l’Alliance des civilisations. Il en va des droits de l’homme, il en va de la paix, il en va de la démocratie – des valeurs auxquelles j’ai consacré toute ma vie, qui me passionnent et qui sont au centre de cette nouvelle initiative des Nations unies.
Vous n’êtes pas sans savoir que l’Alliance des civilisations, lancée par l’Espagne et la Turquie, en 2005, et qui regroupe aujourd’hui plus de quatre- vingt-dix membres vise, au fond, à s’attaquer à l’idée – aussi fausse que répandue – que les cultures se trouvent sur une trajectoire de collision inévitable et que la paix et la stabilité mondiales sont menacées par des conflits d’identité intraitables.
Dit sous un autre angle, plus positif, l’Alliance cherche à traiter les divisions croissantes entre les sociétés, en réaffirmant un paradigme de respect mutuel entre peuples et communautés aux traditions culturelles et religieuses différentes, tout en s’efforçant de promouvoir la bonne gouvernance de la diversité culturelle.

“Comment vivre ensemble, en respectant l’autre dans sa différence ?”, «Pouvons nous vivre ensemble, égaux et différents?», telles sont donc les questions auxquelles l’Alliance tâche d’apporter des réponses en mettant sur pied de projets concrets dans les domaines de la jeunesse, de l’éducation, des médias et des migrations. L’Alliance mène son action par la création de partenariats avec des gouvernements, mais également avec le secteur privé, les médias, la société civile et les organisations intergouvernementales dont, bien évidemment, le Conseil de l’Europe.

Monsieur le président
Mesdames et Messieurs

En cette année de célébration du soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, la certitude devrait l’emporter sur les doutes, la proclamation des réussites sur l’inventaire des insuffisances et l’affirmation de l’universalité et de la pérennité sur les constats d’échec.
Nous sommes tous, cependant, conscients que, de nos jours, les droits de l’homme sont sur la sellette, en proie à toute sorte d’accusations. À cause des doubles standards; à cause des inégalités profondes qui marquent notre temps; à cause de ce mal de vivre ensemble que nous éprouvons de façon plus aiguë en raison de la mondialisation…

Au fond, c’est toujours l’universalité des droits de l’homme qui est au cœur de toutes les disputes, compte tenu des difficultés rencontrées pour les combiner d’une façon adéquate avec le respect de la diversité culturelle au sens large.
Disons que la nouveauté n’est pas tant la diversité en soi –puisqu’elle a de tout temps existé -, mais plutôt la reconnaissance que la gestion de la diversité culturelle lance un défi sans précédents à nos démocraties. Au fond, l’Alliance des civilisations émane de ce constat, doublé du refus du choc inévitable entre civilisations.
Bien sûr, depuis le tout début de l’Alliance, nombreux sont ceux qui y ont vu un verre à moitié vide, plutôt qu’à moitié plein. Et je ne suis pas sans ignorer qu’elle a été accueillie avec un brin d’indifférence, voire de scepticisme, bien que l’argumentaire proposé ait été souvent plutôt disparate.
C’est pourquoi, en acceptant de devenir son porte parole, j’ai fait de la prudence mon mot d’ordre, bien que la confiance soit mon refrain, certain qu’il s’agit d’une bonne initiative, survenant au moment opportun.
En effet, à mon sens, l’Alliance représente un espace global de gouvernance de la diversité culturelle au titre de quatrième pilier du développement durable, et en cela elle comble ainsi un vide qui est bel et bien de nature politique. Elle se veut un laboratoire de partenariats et de mise en œuvre de projets communs, orientés vers la réalisation d’un certain nombre d’objectifs pratiques en matière d’éducation, de jeunesse, de médias et de migration, ses quatre domaines d’intervention.

Mais, il est clair que les défis sont considérables.
Ou nous parvenons à divulguer l’Alliance et à l’ancrer aux processus régionaux en cours, en l’intégrant dans leurs agendas respectifs (je pense, par exemple, à l’Union européenne, à la Ligue arabe, à l’Organisation de la conférence islamique, à l’APEC, à l’Ibéro-Amérique, à l’Union africaine, au Conseil de l’Europe naturellement…), ou bien nous passerons difficilement le cap des bonnes intentions.
Ou nous réussissons à l’inscrire dans l’agenda interne des États, ou bien il sera difficile de dépasser le plan rhétorique des beaux discours.
Ou nous parvenons à mobiliser la société civile, ou bien nous mettrons en danger notre objectif ultime: celui de viser des petites améliorations sur le terrain, porteuses d’un nouvel espoir pour les peuples.
Voilà pour les trois défis majeurs de l’Alliance.

Monsieur le président
Mesdames, Messieurs

L’Alliance des civilisations concentre ses efforts sur la coopération interculturelle et le développement des pratiques de bonne gouvernance de la diversité culturelle. Aussi travaille-t-elle actuellement avec tous ses membres pour que soient développées et mises en œuvre des Stratégies nationales pour le dialogue interculturel envisageant des mesures dans le domaine de l’éducation, des jeunes, des médias et de l’intégration des minorités.
En outre, nous misons sur la création de réseaux sur le terrain, engageant les acteurs de la société civile et le secteur privé, dont le but est de développer des activités conjointes permettant de réduire les tensions multiculturelles et d’établir des ponts entre les communautés.
Pour atteindre nos objectifs, la coopération avec le Conseil de l’Europe jouera un rôle décisif.
Riche de son expertise incomparable dans le domaine des droits de l’homme, de l’expérience acquise, de la chute du mur de Berlin au suivi des processus de transition démocratique en Europe, de son action de longue date pour renforcer la coopération culturelle et la cohésion sociale à l’échelle du continent, de son engagement résolu dans le développement du dialogue interculturel, aussi bien au sein des sociétés européennes qu’entre l’Europe et ses régions voisines, le Conseil de l’Europe est un partenaire essentiel pour l’Alliance des civilisations.
Je me réjouis de le compter parmi le « groupe d’amis » qui soutiennent l’Alliance, et j’ai déjà pu apprécier l’importance du soutien reçu des principales institutions du Conseil de l’Europe (le Comité des Ministres, votre Assemblée, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux) ainsi que celui du secrétaire général.
C’est pour cette raison que le mémorandum d’accord que j’ai signé aujourd’hui avec le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe revêt à mes yeux une importance toute particulière.

A cet égard, je tiens à souligner plus spécialement deux points:
– l’importance du Livre Blanc sur le dialogue interculturel, lancé en mai 2008 par le Comité des Ministres, qui agit à la fois comme une boussole pour nos efforts conjoints (en rappelant les principes fondamentaux sur lesquels le dialogue interculturel doit s’appuyer) et une véritable « feuille de route » pour le développement de la coopération entre le Conseil de l’Europe et l’Alliance des civilisations dans ce domaine essentiel. Je me réjouis que ce document de premier ordre existera non seulement dans les deux langues officielles du Conseil de l’Europe (le français et l’anglais), mais aussi dans des langues aussi répandues que l’allemand, le russe, l’arabe, l’espagnol, l’italien et (je l’espère) le portugais ;
– le rôle spécifique revenant au Centre Nord-Sud, qui par son emplacement à Lisbonne et sa vocation de « pont entre l’Europe et ses régions voisines » est un partenaire naturel et peut s’affirmer comme une force motrice dans l’établissement et le développement de synergies entre le Conseil de l’Europe et l’Alliance.
Ici je pense plus particulièrement à l’espace méditerranéen, lieu où se joue l’avenir du dialogue entre les cultures et les religions. Il y va de notre intérêt à tous de faire progresser ces échanges sur la base de la réciprocité et de la transparence. L’Alliance des civilisations est partie prenante dans cette entreprise et compte sur le Centre Nord-Sud pour multiplier les chances de réussite du changement et faire la différence.

Nous avons d’ailleurs déjà programmé un certain nombre d’activités communes, dont le « forum de Lisbonne », en novembre, qui traitera, à juste titre, de la question des plus actuelles qu’est le principe d’universalité des droits de l’homme et de sa mise en œuvre aux niveaux international et régional, au regard du 60e Anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
En somme, j’ose espérer que le mémorandum signé aujourd’hui marquera un tournant décisif dans nos relations et qu’il y aura désormais un « avant » et un « après ». Pour ma part, soyez certain que je ne ménagerai pas mes efforts pour éviter à la coopération entre l’Alliance et le Conseil de l’Europe de devenir un jeu de somme nulle et pour qu’ensemble, nous fassions toujours partie de l’équipe gagnante.

M. President
Ladies and gentlemen

Since the 11 September 2001 attacks, the notion that we are facing a so-called “clash of civilizations” has, alas, gained increasing support. In reaction to this worldview, initiatives aimed at fostering greater understanding between different faiths and cultures have proliferated.

Regarding more particularly inter-faith efforts, these are probably a reflection of increasing awareness in political circles of the importance of religious communities to address the problems of an increasingly interdependent world. They also reflect a concern over the detrimental impact that religious extremism is having on global stability and the need to foster and strengthen more moderate and constructive forces within religious traditions as a bulwark against such developments.
For all these reasons, the Alliance expresses strong support and encouragement to all efforts that are inclusive of diverse religious leaders and activists in an effort to enhance and facilitate their contribution to cross-cultural understanding and peace-building.
As an initiative with a global scope, the Alliance aims at consolidating its role within the UN Global Agenda as its pillar for good governance of cultural diversity and as a tool for conflict prevention and peace building.
When conflicts are framed in terms of identity rather than competing interests, they easily become intractable. Efforts to address cultural and religious divides are therefore of utmost importance and good governance of cultural diversity is part of any comprehensive approach to sustainable peace.
It goes without saying that political conflicts can only be solved through political negotiations. The long-term resolution of tensions between Muslim and Western societies, for example, cannot be achieved as long as some of the egregious sources of hostility are not successfully addressed.

But it is equally true that peace agreements rarely hold if they are not strongly backed by the communities involved. Many peace deals in the past have floundered because deep-seated suspicion and hostility remained, dividing people along cultural and religious lines. In other words, creating the necessary conditions for sustainable peace requires efforts of a different kind, aimed at generating a mind shift among divided communities. This can be achieved by instilling in people, particularly the young, the values of tolerance and respect for the other. People-to-people activities, also known as “city diplomacy”, youth exchange programs and civic education also contribute to that goal. So do initiatives that promote informed debate in the media on immigration, integration and the management of cultural diversity.
That is why efforts to address cultural and religious divides are so important. They can help lift the hurdles that hamper negotiations and pave the way towards successful political dialogue. Post conflict, they can support the long and arduous process of reconciliation. And when the peaceful co-existence of different communities is being threatened by simmering tensions, these efforts can help prevent conflicts developing in the first place.

M. President
Ladies and Gentlemen

In my role as the United Nations Secretary-General’s High Representative, I have been promoting the implementation of National Strategies for cross-cultural dialogue, helping to connect government policies with civil society initiatives aimed at reconciling divided communities. The Alliance also acknowledges the constructive role that religious communities can play in mediation and conflict resolution. To support this process, the Forum of the Alliance, held in Madrid last January, brought together religious leaders from across the world to identify and commit to strategies that support peace-building in their communities.
In order to help create the social conditions that foster tolerance and understanding, the Alliance also generates practical projects that promote cooperation among diverse cultural and religious communities. For instance, in January, it supported the launch of “Silatech”, a major youth employment initiative in the Arab world. Supported by an international partnership that transcends cultural and religious divides, this project will help the process of job creation and enterprise, connecting first-time job seekers to networks of employers and providing them with training and resources to build their skills and access capital.

Addressing prejudice and stereotypes that increase polarization among cultures is equally important. To this end, an Alliance of Civilizations Media Fund was created earlier this year, with the support of major Hollywood companies, to finance mainstream productions that challenge negative portrayals of minorities. With a view to promoting informed debates on sensitive international issues in the media, the Alliance has also developed an online resource of global experts who can provide analysis and commentary to journalists in times of intercultural crises.
The strategy of the Alliance of Civilizations is to work on all these fronts with all partners as it recognizes the importance of facilitating dialogue in a variety of ways.

M. President
Ladies and Gentlemen

As you know quite well, these are all long-term efforts. They will not bear fruit overnight. But their importance should not be underestimated.
As much as mediation and hard-edged political negotiations, they are essential to build conditions for sustainable development and lasting peace. To achieve these goals, we should stand united in our common endeavors in contributing to make the world a better place to live in.

Thank you